Exposer à droite, pourquoi et comment faire ?
Nous rentrons ici dans des conseils pour les photographes un peu plus avancés. La technique photo que je vous présente dans cet article, exposer à droite, nécessite de maitriser et connaitre déjà les termes de bases, à minima déjà l’exposition en photographie. Je vous rassure de suite, pas besoin d’être un photographe professionnel pour comprendre l’idée générale et l’appliquer concrètement. Si vous souhaitez apprendre la photo plus en détail, cet article est alors fait pour vous !
Car c’est finalement l’objectif aussi de ce blog photo, essayer de vulgariser au mieux la photographie et tout ce qui tourne autour, technique, conseils, matériel photo et autres. La technique elle-même vous permettra de tirer le meilleur de votre capteur et améliorera la qualité de vos photos de manière générale, plutôt cool, non ?

Je te propose de découvrir mes packs de fiches photo pratiques. C'est un moyen simple, sympa et ludique pour apprendre et progresser en photographie, en particulier sur le terrain !
Après vous avoir rappelé la notion d’histogramme en photo, je vous présente l’intérêt réel d’exposer à droite, comment on fait dans la pratique avec son appareil photo reflex (ou autre), quelles sont les limites de cette technique ou encore comment réaliser le post traitement d’une telle photo. En fin d’article, je vous montre un exemple concret de l’utilité de cette technique et des effets bénéfiques qu’elle a sur la qualité de vos photos. Retenez cependant, que cette technique nécessite de devoir shooter en RAW pour plus d’efficacité.
Rappel sur l’histogramme
Avant de se lancer à corps et âme perdu dans l’exposition à droite (enfin façon de parler !), je souhaitais faire quelques petits rappels sur cette notion très importante. J’ai d’ailleurs écrit un article complet sur l’histogramme en photo si vous n’êtes pas encore à l’aise avec cette notion.
De manière simplifiée, l’histogramme est la représentation graphique de l’ensemble des tons de votre photo. Pour parler simplement, vous avez déjà une bonne idée, dès la prise de vue, si votre photo est sous-exposée, surexposé, ou manque de contraste par exemple.


Alors pourquoi utilise-t-on le terme « exposer à droite ». L’idée est de faire tout simplement référence à l’histogramme de votre photo. Ce dernier est composé de plusieurs zones, de gauche à droite :
- Les zones noires ou très basse lumière,
- Les zones d’ombres,
- La zone des tons moyens,
- La zone des tons clairs,
- La zone des blancs ou haute lumière.
Pour parler simplement, plus votre histogramme sera serré à gauche, plus vous aurez une photo avec des tons sombres et noirs. L’inverse concerne donc cet article, puisque la technique expliquée ici consistera à exposer « le plus à droite possible » votre histogramme (mais éviter de surexposer, on y revient après). L’intérêt sera donc de faire rentrer le maximum de tons clairs et haute lumière dans votre image. Je vous explique le pourquoi du comment de suite.
Pourquoi exposer à droite, un peu de théorie
Sans rentrer dans de grands détails, il est nécessaire de fournir quelques explications sur l’intérêt d’exposer à droite en photo. En premier lieu, il faut savoir qu’il existe une différence entre le fichier JPEG (celui de base dans votre appareil) et le fichier RAW qui est l’équivalent d’une pellicule en format numérique, c’est-à-dire une image brute qui doit être traitée en post-production.
Pourquoi je vous raconte ça ? Il faut savoir que quand vous déclenchez avec votre reflex, le capteur enregistre des niveaux de luminosités différentes selon si vous êtes en JPEG/RAW. Au format JPEG, le capteur enregistre 256 niveaux de lumière (codé en 8 bits) contre 4096 ou 16 394 nuances en RAW (selon si 12 ou 14 Bits). Bref, c’est un détail mais tout ça pour dire que vous avez beaucoup plus d’informations dans un RAW que dans un JPEG.

L’important c’est de retenir que les niveaux de luminosité ne sont pas répartis équitablement sur un histogramme. En effet, environ 50% sont consacrés à la zone des hautes lumières (la zone à droite de l’histogramme). Puis la moitié restante est destinés aux nuances voisines, etc. Encore une fois, concrètement, ça veut dire quoi ? Vous allez tout simplement obtenir plus de données enregistrées dans les hautes lumières que dans les tons moyens ou encore les tons sombres. Pour faire très simple, vous réussissez à capter beaucoup d’informations quand votre photo est claire et quasiment plus rien dans les zones d’ombres ou noires.
Pour preuve, j’ai fait le test de prendre deux photos. La première où l’exposition a été faite avec mon mode semi-automatique Av et la deuxième où j’ai augmenté de +1 à la correction d’exposition. Les deux photos présentent une exposition correcte et aucune zone blanche n’a été cramée. Pourtant, la photo de droite présente beaucoup plus d’informations que celle de gauche. La preuve elle est plus lourde de « 2,3 Mo ». Même si l’image peut paraitre très claire, sur le ciel, cette dernière présente beaucoup plus d’informations et de détails dans les zones sombres de l’image, en particulier sur le talus au premier plan. PS : c’est une photo pour illustrer mes propos, pas un chef d’œuvre !


Si vous débutez en photographie ou que vous avez lu l’article sur la sensibilité ISO, vous devez savoir que les photos réalisées dans les basses lumières et souvent à haut ISO, sont sujettes à l’apparition d’un bruit numérique, ce qui donne un effet très inesthétique aux photos. L’idée générale avec cette technique est donc de limiter au maximum l’apparition de zones d’ombres ou noires et de focaliser sa photo sur la partie droite de l’histogramme. En effet, il sera beaucoup plus facile de récupérer des informations dans les zones claires de l’image (en les sous exposant) que de chercher des informations dans les zones noires (en les surexposant). Dans le dernier cas, l’apparition de bruit sera bien plus importante. J’ai d’ailleurs écrit un article complet pour savoir comment réaliser les photos en intérieur et en basse lumière, ça vous intéresse ?
Gardez en tête : « je récupère un max d’information pour mon post-traitement ensuite sur l’ordinateur ». Au plus vous allez exposer sur des tons moyens ou sombres de votre photo, au plus vous perdez des infos et détruisez la qualité de votre image en réalité. Cette technique est particulièrement intéressante dès lors que vous avez des scènes contrastées avec de grandes différences de lumières (par exemple en photo de paysage). Si vous êtes déjà dans des conditions difficiles, et selon votre matériel, cette technique sera déconseillée. On y revient plus bas.
Comment exposer à droite en pratique ?
Après avoir vu les détails en chiffre et l’intérêt de « shooter à droite » comme on dit dans le jargon photo, voyons maintenant comment faire en pratique sur son appareil photo. Je précise, que peu importe si vous utilisez un boitier reflex ou hybride ou compact, l’histogramme est toujours-là (quoi que je ne connaisse pas beaucoup de gens qui shootent en RAW sur un compact et qui retouche leur photo !).
Comme on l’a vu, l’objectif c’est de pousser son histogramme à droite. Attention, il faut absolument que l’histogramme ne soit pas entièrement collé à droite, ou coupé sur la droite. Si c’est le cas, cela veut tout simplement dire que votre photo est largement surexposée et que vous avez donc perdu toutes les informations se trouvant dans les zones blanches. Concrètement, vous n’avez que du blanc et vous n’allez rien pouvoir récupérer en post-traitement en termes de détails.
En premier lieu, vous devez déjà regarder votre manuel pour savoir sur quel bouton vous devez appuyer pour faire afficher l’histogramme de votre photo (souvent le bouton INFO ou DISP). Vous pouvez ensuite utiliser cette technique soit dans un mode semi-automatique, soit en mode manuel. On y vient.

Si vous utilisez les modes semi-automatiques (Type Av / TV chez Canon), la manipulation sera la suivante :
- Placez-vous avec votre appareil photo numérique devant le sujet, travaillez votre cadrage et choisissez vos réglages,
- Déclenchez une première photo et observez votre histogramme. Si ce dernier est trop centré (et donc pas assez à droite), vous allez devoir utilisez ce qu’on appelle la correction d’exposition. Chez Canon, vous devez appuyer sur le bouton « Q » pour pouvoir accéder aux réglages du menu. Il vous suffit alors d’utiliser une correction d’exposition positive, c’est-à-dire de décaler le petit curseur à droite du zéro (à +1/3, +2/3 ou +1),
- Déclenchez de nouveau votre photo, et vous pouvez voir que votre photo sera plus claire,
- Réitérez plusieurs fois la manipulation en décalant au pire de plusieurs crans vers la droite. Il peut être nécessaire selon les conditions de se décaler jusqu’à +1, voir +1,5.
Pour ceux qui sont à l’aise avec le triangle d’exposition (ISO, vitesse d’obturation, ouverture du diaphragme), vous pouvez au lieu d‘utiliser la correction d’exposition, passer en mode Manuel (M) et choisir les réglages qui vous conviennent le mieux pour coller votre histogramme à droite. Par contre, cela demande une très bonne maitrise des paramètres, mais je sais que dans certaines situations, le mode Av ne me suffit pas et je préfère passer en Mode M.
Sur l’écran, vous allez parfois trouver la photo trop claire, cela dépendant évidemment aussi de la luminosité de votre écran. Ne vous y fiez donc pas trop. Vous pouvez aussi activer sur certains appareils un indicateur de surexposition qui va vous informer si votre image est « cramée » (trop claire). Mais ce n’est pas non plus une science exacte. Je vous en parle dessous.
Les limites de cette technique
Cette technique, très apprécié de beaucoup de photographes a cependant des limites d’utilisations. Voici, selon moi, les principales :
- La première chose essentielle à savoir est que l’histogramme affiché sur l’écran de votre boitier, même si vous shootez en RAW, n’est qu’une « vulgaire approximation » des tonalités de votre JPEG associé au fichier RAW. Le boitier ne sait en effet pas lire du RAW et il sera nécessaire de le passer dans un logiciel pour afficher l’histogramme réel du RAW. Pour ceux qui recherchent un bon logiciel pour fouiller votre RAW en détail -> rawdigger,
- Du coup, une attention particulière devra être faite concernant l’indicateur de surexposition que vous pouvez afficher sur certains appareils photo. Je dirais qu’ils ont toujours tendance à surestimé la surexposition d’ailleurs. Une zone apparaissant comme cramée (trop blanche) en clignotant sur votre histogramme, ne le sera donc pas forcément lors de votre import du RAW sous Lightroom par exemple,
- Pour les photos avec des sujets en mouvement (sport, action, animalière, etc.), cette technique sera applicable dans une certaine mesure. Mon conseil serait de se positionner là où la prise de vue va être faite, de faire quelques photos tests, de caler bien ces réglages (sous-entendu exposé à droite) et de sauvegarder ça. Si la luminosité de la scène ou l’angle de votre prise de vue ne change pas, alors vous pouvez enchainer les photos sans vous soucier de votre histogramme. Si un paramètre change (soleil qui s’en va, vous changer de place, etc.), il faudra recaler son histogramme à droite,

- Je le répète encore une fois ici, mais cette technique d’exposition à droite nécessite obligatoirement de shooter en RAW, de manière à pouvoir bénéficier d’un maximum d’informations lors de la prise de vue, mais aussi de pouvoir en tirer le maximum, surtout dans les zones claires/blanches, là où se situe l’essentiel des données,
- Dernier point à parler concernant les limites de cette technique, le risque de flou de bougé et même de mouvements. Vous allez me dire, c’est quoi le rapport ? Je vois deux cas précis.
Si vous êtes dans des conditions déjà très difficiles au niveau luminosité (sous-bois, concert, etc.), vous allez avoir du mal à pousser votre histogramme sur la droite. En effet, en forçant volontairement l’exposition à droite, vous allez obliger votre appareil à compenser sur un autre paramètre. En utilisant +1 sur la correction d’exposition par exemple, vous allez diminuer la vitesse de la prise de vue et engendrer ainsi un risque plus important de flou de bougé. Si vous êtes déjà limite, par exemple à main levé, la photo risque d’être floue. Avec un trépied, ça ira. Par contre, si votre sujet est mobile, vous risquez d’autant plus avec une vitesse limite de faire un flou de mouvements (c’est la vitesse de la prise de vue qui est trop faible par rapport aux mouvements du sujet). La netteté de votre photo pourrait donc être réduite.
En fonction de l’objectif que vous utilisez, vous allez aussi avoir du mal à utiliser cette technique. Je pense en particulier aux longues focales qui nécessite une vitesse de prise de vue élevée pour éviter d’avoir une photo floue. Encore une fois, plus vous exposez à droite, plus vous risquez d’obtenir une photo floue (ou de devoir monter en ISO pour compenser et risquer l’apparition de bruit).
Post traiter ses photos
Comme déjà évoqué dans l’article, vous allez devoir utiliser un logiciel de post-traitement pour traiter vos RAW. Un des plus connu, et celui que j’utilise est Lightroom. J’avoue que si vous débutez en photographie, les premiers traitements et l’apprentissage du logiciel peuvent paraitre un peu délicat au départ, mais on s’y fait vite !
Si vous avez exposé à droite votre photo, cette dernière risque de paraitre trop claire à votre œil. L’avantage, c’est que vous avez récupéré du détail dans les zones d’ombres (en surexposant légèrement) et que vous avez fait attention à ne pas cramer vos hautes lumières.
L’objectif maintenant c’est très souvent de :
- Réduire l’exposition des hautes lumières tout en gardant du détail (souvent le ciel par exemple),
- Essayer de pousser les noirs de manière correcte et de déboucher les zones sombres de votre image (elles l’auraient été encore plus sans cette technique).
Dans tous les cas, le post-traitement reste une interprétation et un choix très personnel. Il n’y a pas de traitement parfait !
Un exemple concret
Je termine cet article par un petit test en image. J’ai fouillé dans mes archives pour reprendre une photo de mon voyage en Asie qui n’avait pas été parfaitement exposée, légèrement sous-exposée. La technique d’exposer à droite n’avait alors pas été respectée. J’étais en mode Av et l’appareil avait choisi une exposition. J’ai maintenant repris (après coup) les niveaux de la photo pour éclaircir cette dernière de manière « correcte ». Voir ci-dessous la photo retouchée et le zoom à 100%, même si ce n’est peut-être pas très parlant à l’écran !


J’ai ensuite zoomé à 100% sur l’image retouché sous Lightroom pour regarder les zones d’ombres qui avaient été débouchées (comprendre éclaircies) suite au réajustement des niveaux. Comme on peut le voir assez bien, on voit apparaitre un beau grain numérique, des sortes d’artefacts pas très esthétiques qui sont simplement présents car les zones d’ombres ont été éclaircies. La technique d’exposition à droite permet donc d’exposer les zones d’ombres et noires de manières plus « claires » ce qui évite de devoir les éclaircir en post-traitement. Cela limite clairement l’apparition de bruit. Après tout dépendre également de la gestion du bruit de votre boitier (comme quoi c’est important) !
Ainsi, pour conclure sur l’intérêt d’exposer à droite en photographie, je dirais que c’est une technique vraiment très intéressante dans le sens où elle vous permet de tirer le meilleur de votre capteur en évitant de créer du bruit dans les zones d’ombres/sombres de votre image, mais surtout de récupérer un maximum d’information dans les hautes lumières. Bref, c’est une des astuces photo que j’utilise dès que je photographie en tout cas et je vous conseille vraiment de l’essayer !
J’espère en tout cas que les explications de l’article ont été claires ? Tout a été saisi ? Vous êtes prêt à essayer la chose ? Si vous aimez les techniques intéressantes pour améliorer vos photos, je vous invite à comprendre la pose longue en photographie.
A bientôt, et bonne photo,
Sylvain
Vos explications sont d’une clarté incroyable. J’ai enregistré dans Pinterest pour pouvoir m’y référer rapidement. Merci.
Merci beaucoup 🙂
Mélanie
Merci pour toutes les précieuses informations qui nous serons très utiles
Coucou André,
Merci de ton commentaire 😉
Sylvain
Bel article. Ce qui me fait plaisir dedans, c’est que tu es l’un des premiers à évoquer le fait que l’histogramme de l’appareil est approximatif. Beaucoup se collent religieusement à cette information sans déroger à cette règle. Mais oui, cet histogramme n’est pas parfait. Pour ma part, et c’est ce que je conseille, c’est de bien connaître SON matériel. Pour cela il faut connaitre l’histogramme affiché par son appareil pour une photo donnée et le comparer à l’histogramme de la même photo dans Lightroom (ou autre logiciel). A force j’ai fini par ajuster l’histogramme de mon appareil pour qu’il colle à ce que j’attends dans Lightroom. Ca ne fonctionne pas dans 100% des cas, mais ça aide bien. Bravo pour cet article.
Philou – https://photo-pedago.fr
Coucou Philou,
Oui comme tu dis il faut s’en servir pour guider et non pas comme une science exacte ! 😊
Sylvain